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Antonella DEL PRETE

By 20 février 2020février 2nd, 2024Professeur·es invité·es 2020

Du 24 février au 24 mars 2020

Descartes et les Pays-Bas, les Pays-Bas et Descartes : rencontres, incompréhensions, conflits.

Les rapports entre Descartes et les Pays-Bas peuvent être considérés comme un cas de transfert culturel, qui agit dans les deux directions : d’une part il est possible de retracer l’influence que le contexte culturel néerlandais exerce sur la pensée de Descartes, du moins à partir d’un certain moment ; de l’autre la diffusion du cartésianisme produit des changements importants dans la vie intellectuelle néerlandaise. Le cartésianisme néerlandais possède des caractères spécifiques, qui le distinguent des cartésianismes français, italien ou britannique. S’agissant d’un phénomène très complexe je me limiterai à explorer quatre moments qui ont une fonction emblématique : 1) l’explosion du conflit sur l’interprétation de la Bible et sur les rapports entre la philosophie et la théologie ; 2) la réaction des cartésiens à la philosophie de Spinoza.

Mes recherches les plus récentes portent sur la réception de la pensée de Descartes. Le cartésianisme néerlandais permet d’étudier différent types de réceptions et de transferts, et de poser très généralement les questions de savoir comment une philosophie qui s’adressait initialement à un public français et catholique s’est implantée dans un pays réformé ; quel type d’effet en retour ce contexte national, religieux et culturel a eu sur la philosophie de Descartes ; comment des positions philosophiques, concernant la métaphysique, ont pu interagir avec la vie religieuse et politique ; comment le cartésianisme néerlandais a interagi avec un philosophe comme Spinoza, qui était lui aussi le produit d’un transfert culturel complexe.

Le séjour me permettra de faire avancer de manière substantielle voire de compléter la rédaction d’un livre sur le cartésianisme aux Pays-Bas. Certaines sections, rédigées ou à rédiger, sont susceptibles d’être exposées sous forme de séminaire. Les axes thématiques qui feront l’objet l’objet de deux séances de séminaire, qui pourront être suivies par les étudiants comme un tout ou bien suivies individuellement, sont les suivantes :

 

1) Définir les frontières entre la philosophie et la théologie : les cas du cartésianisme aux Pays-Bas (1650-1670).

Cette séance aura lieu dans le cadre du séminaire « Mathesis » de la République des savoirs, le jeudi 27 février, de 12h à 14h (salle Pasteur).

La spécificité du cartésianisme néerlandais, et donc du transfert culturel qui consiste à acclimater une philosophie française et catholique dans un pays calviniste, se manifeste dans les querelles qui ont lieu entre 1652 et 1656 : ce qui est en question est la compatibilité entre l’héliocentrisme et l’interprétation littérale de la Bible. Les partisans de Descartes élaborent une herméneutique agençant des arguments couramment utilisés par les théologiens réformés et des affirmations provenant des textes de Descartes. Leurs positions non seulement donneront lieu à une campagne pamphlétaire mettant en question les rapports entre les facultés de arts et de théologie et entre les autorités politiques et religieuses, mais posent les fondements d’une théologie cartésienne qui verra le jour dans les décennies suivant.

2) Les effets du Tractatus theologico-politicus et de l’Ethique : Lambert van Velthuysen et Spinoza.

Cette séance aura lieu dans le cadre du séminaire de Jean-Pascal Anfray « Temps, durée et persistance. De Suárez à Leibniz », le mardi 3 mars, de 10h à 12h (salle des Résistants).

La seule publication que Spinoza a signée de son propre nom ce sont les Principia philosophiae cartesianae : malgré le fait que la préface de Lodewijk Meyer souligne ce qui est le propre de la position de Spinoza, c’est sous le signe de Descartes que Spinoza se présente au public. Et pourtant son deuxième ouvrage, publié anonymement, le Tractatus theologico-politicus dissipe toute illusion : Spinoza n’est pas un cartésien. Des recherches récentes ont révélé que le groupe cartésien d’Utrecht se mobilise pour le réfuter mais, en même temps, pour faire venir Spinoza à Utrecht : ce qui arrivera et qui permettra un véritable dialogue. Analysant les positions de Lambert van Velthuysen il est possible de retracer les raisons de cette attitude à deux visages et de constater que Spinoza agit comme un révélateur des tendances internes du cartésianisme : en le réfutant, les cartésiens sont obligés à se mesurer avec leur appropriation et leur interprétation de la pensée de Descartes, ce qui les amènera à apporter des changements à leurs positions initiales.

Un autre axe de recherche concerne la question de l’infini entre Renaissance et âge classique : il s’agit d’une question qui constitue une charnière entre différentes disciplines, comme les mathématiques, la logique, la physique et la théologie. Mon point de départ est la cosmologie de Giordano Bruno et sa théorie de l’univers infini, mais la distinction entre l’infini et l’indéfini est au centre également de la philosophie cartésienne. C’est dans ce cadre que se situeront une intervention à un colloque et un dernier séminaire :

3) Connaître l’infini : Gassendi vs Descartes.

Le colloque Descartes et Gassendi se tiendra les 13 et 14 mars.

Les Objections et Réponses aux Méditations sont un véritable laboratoire. Les réponses que Descartes donne à ses interlocuteurs sont parfois de l’ordre des simples précisions, mais souvent elles ajoutent des argumentations qui sont des évolutions par rapport au parcours du méditant. À Caterus, Descartes précise ainsi ce qu’il entend lorsqu’il parle d’une connaissance claire et distincte de Dieu et il esquisse une distinction entre l’infini et l’indéfini. Dans le cadre d’un colloque consacré à l’échange entre Descartes et Gassendi, j’examinerai la réaction de Descartes face à une objection qui regarde notre connaissance de l’infini. J’essaierai de suivre l’évolution de la polémique et d’étudier les effets de retour que cet échange a sur les deux protagonistes et sur leur production philosophique ultérieure.

4) Retravailler Copernic : la cosmologie de Giordano Bruno.

Cette séance est annulée.

Giordano Bruno est le seul philosophe qui embrasse les théories coperniciennes au XVIe siècle. Parmi ses contemporains il est aussi celui qui mène à des conséquences extrêmes les innovations astronomiques de l’héliocentrisme. Après avoir indiqué quel rôle est attribué à Copernic dans les dialogues italiens de Bruno, j’illustrerai les changements profonds que Bruno apporte à la cosmologie et à la physique péripatéticienne, au nom de son interprétation de l’héliocentrisme. Affirmer que l’univers est infini n’est pas la seule modification que Bruno apporte à l’astronomie copernicienne. Déjà dans les dialogues italiens, mais de manière bien plus nette dans le De immenso, d’une part Bruno continue de s’approprier des découvertes de l’astronomie contemporaine afin de les utiliser dans sa cosmologie ; de l’autre, il bouleverse totalement la structure du système solaire. Il s’agira de repérer les raisons philosophiques de ces propositions qui n’ont pas de valeur mathématique et astronomique proprement dit.

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